Bon, me voilà rendue dans mes bonnes vieilles terres versaillaises après 4 heures de lavage de cerveau dans le bureau du "psycho-tragédien" (tout un programme!).
Même pas le loisir de faire un petit tour dans Lille, rien.
A peine arrivée à la gare de Lille Flandres, le type à la voix de folle m'appelle et me prévient qu'un autre type m'attend dans une Clio grise à l'angle entre le Flunch et l'hôtel Ibis... Je me dis que ça ressemble à un coup fourré, et je me plais quelques secondes à m'imaginer dans un roman d'espionnage dont je serai la héroïne.

Mes pensées oniriques retombent bien vite lorsque je me retrouve face à face avec le fameux consultant. Tout se confirme: il n'avait pas que la voix d'une folle, il en a le physique et les attitudes. Soit, je mets mon détecteur sensoriel d'homos à ultrasons en mode off, et l'entretien peut commencer.
Il commence par des mises en situations, des sortes de mini pièces de théatre dont je serais l'actrice, et lui me donne la réplique. Je ne peux à cet instant m'empêcher de penser que je suis ENCORE tombée dans une maison de fous.


A un moment, il se prend pour mon frère et me dit: "Sophie, j'ai décidé d'aller vivre à Madrid en Espagne, je vais vivre avec.... (avant même qu'il n'ait fini la fin de sa phrase, j'avais déjà compris).... David!".
Ok, j'ai compris, il veut me tester et savoir si je suis "gay-friendly", mais oui, pas de problème mon gars, je suis "open-minded", tu peux y aller! J'avoue avoir une légère aversion pour ce qu'on appelle le "milieu" homosexuel, mais je n'ai rien contre les homos qui vivent leur amour sans ostentation ni provocation, en toute simplicité. Il ne m'aura donc pas à ce jeu là.
Après cet interlude, il s'attache à ma féminité: "Vous avez un physique qui n'est pas désagréable. Si des ouvriers qui vous sifflent, que faites vous?". Allons bon, il ne manquait plus que cela au tableau. Cette situation, c'est bien simple, toutes les femmes, et particulièrement celles qui travaillent dans des milieux d'hommes comme moi, la vivent tous les jours, et pas simplement de la part d'ouvriers... Des cadres supérieurs peuvent également s'y adonner, de manière plus dissimulée certes, mais quand même! C'est monnaie courante dans le BTP notamment.


Bref, j'ai également eu le droit de procéder à une analyse psychologique de Napoléon, Cambacérès et Portalis pour déterminer si ce sont des leaders ou des "managers", et j'ai eu le loisir de détailler toute l'oeuvre de Maupassant. J'ai jubilé lorsque j'ai pu le moucher en lui certifiant que Jostein Gaarder était un auteur norvégien, et non américain comme il le prétendait.


Après moult tests psychologiques dont je ne voyais plus la fin, j'ai eu le droit de détailler sur une feuille blanche mes impressions après toutes ces épreuves et d'analyser la personnalité du consultant. Et là, je me suis lachée en disant que c'était un original et que leur dernière question était à l'image de l'homme: introspective et pour le moins surprenante!


Dernière remarque: le poste: Un poste à reponsabilités de chef de service, avec des gens sous son autorité. J'ai toutes les connaissances requises, mais comme on dit, il ne faut pas poussser mémé dans les orties: je vois mal un quiquagénère autodidacte de 30 ans d'expérience recevoir des ordres d'une minette qui sort la fac.
Les recruteurs ont leurs raisons que la raison ne connait pas....